Le Vaisseau fantôme, opéra de Richard Wagner, sous la direction de Rudolf Piehlmayer, mis en scène par Beverly et Rebecca Blankenship, devrait transporter le public partout en Bretagne et Pays de Loire le 13 juin à 20h. ©Théâtre de Hagen (Allemagne)

Le Vaisseau fantôme, opéra de Richard Wagner, est actuellement en représentation aux opéras de Rennes et de Nantes. Le 13 juin, le spectacle sera retransmis en direct sur grand écran dans une trentaine de lieux de Bretagne et des Pays de Loire (y compris Belle-Île-en-mer, Jersey et Guernesey). Un événement gratuit et ouvert à tous. L’occasion d’une découverte pour ceux qui ne sont pas habitués à cet « art total » et qui trouveront ainsi un accès facilité à une représentation qui promet un grand moment de plaisir musical. (Retrouvez en bas de cet article une carte interactive des lieux de diffusion.)

©Théâtre de Hagen (Allemagne)

L’Opéra sur écran(s) est une opération renouvelée tous les 2 ans depuis 2009. Elle a pour objectif d’ouvrir l’opéra au plus grand nombre pour le démocratiser et rendre le plus accessible possible le plaisir de l’art lyrique. Innovation cette année : elle ne concerne plus seulement la Bretagne mais également les Pays de Loire, grâce à un partenariat entre l’Opéra de Rennes et celui d’Angers-Nantes et devrait à l’avenir avoir lieu tous les ans.

Cependant, la volonté de démocratiser l’opéra peut ne pas suffire si les spectateurs potentiels se sentent intimidés ou illégitimes. La peur de ne pas comprendre ou de s’ennuyer sont en effet des freins importants. Comment, alors, lever ces freins pour passer une bonne soirée ? Comment aborder l’opéra quand on n’a pas l’habitude de l’art lyrique ? Comment profiter du spectacle ? Nous avons demandé des conseils à Mathieu Rietzler, directeur de l’opéra de Rennes.

Mathieur Rietzler, directeur de l’Opéra de Rennes ©Opéra de Rennes

Trémolo Magazine . Quand on n’a pas l’habitude de l’Opéra, on peut hésiter à y aller. Une opération comme l’Opéra sur écran(s) est donc un bon moyen de découvrir. Comment l’aborder dans les meilleures conditions ?

Mathieu Rietzler . Aller à l’Opéra, ce n’est pas quelque chose de quotidien, c’est un événement. Le mieux est donc, je pense, de lâcher prise, de se dire qu’on va vivre un grand moment, exceptionnel. On peut alors se laisser prendre par la main et vivre cette aventure.

Je voudrais aussi rappeler que l’Opéra est un endroit de partage. On va, pendant quelques heures, vivre une émotion collective forte avec des personnes inconnues mais avec lesquelles on partage quelque chose. Exactement comme devant un match de football.

TM . Comment qualifieriez-vous l’opéra ?

MR . L’Opéra est un spectacle total, surtout chez Wagner. Il y a non seulement du chant mais aussi du théâtre, parfois de la danse, un orchestre, des décors, des costumes, des lumières… Par conséquent, même si par moments on décroche, on a toujours quelque chose à quoi se raccrocher. C’est cet aspect spectaculaire qui le rend très accessible. En outre, lorsque l’on va voir un spectacle vivant, il y a aussi un partage avec les artistes, qui est formidable.

Et puis les sujets sont universels. Par exemple, l’histoire du Vaisseau fantôme est celle du Hollandais volant et elle est tirée de la mythologie. C’est donc une histoire de notre culture commune, qui a été maintes fois réécrite, dans la littérature, la poésie, et même au cinéma… L’histoire Pirate des Caraïbes, par exemple, est très proche de celle du Vaisseau fantôme.

TM . Est-il souhaitable de connaître l’histoire à l’avance ?

MR . Cela dépend des personnes. Celles et ceux qui ont besoin de tout comprendre gagneront à s’intéresser à l’histoire avant la représentation. Mais ce n’est aucunement obligatoire si l’envie n’y est pas. Aller à l’opéra n’est pas une corvée de culture, on peut aussi se laisser porter par le moment.

Cela est d’autant plus vrai que de notre côté, nous faisons un effort de médiation. Nous donnons un programme aux spectateurs, nous proposons des clés pour aborder l’œuvre. Et en outre, les mises en scène d’aujourd’hui s’attachent à rendre le spectacle lisible et il y a maintenant des sur-titres presque partout. Le 13 juin, il y aura des sous-titres sur l’écran.

Enfin, il ne faut pas avoir peur des moments de décrochages, parce qu’ils sont normaux. Ils font partie de l’expérience et ce n’est pas grave, si, par moments, il y a des instants où l’esprit s’évade.

TM . Pourquoi ce choix du Vaisseau fantôme ?

©Théâtre de Hagen (Allemagne)

MR . Avant tout, nous ne souhaitions pas nous cantonner aux 5 opéras les plus célèbres pour ces projections et nous avions une volonté d’ouvrir des horizons. Parmi les opéras de Wagner, le Vaisseau fantôme est un des rares que nous pouvons accueillir, pour des raisons de place. (Les opéras de Wagner sont en effets des œuvres monumentales, écrites pour être jouées par un orchestre comptant beaucoup de musiciens. Il faut donc, matériellement, de la place.)

Mais il s’agit surtout d’un grand chef d’œuvre de Wagner. C’est un flot de musique de la première à la dernière seconde, une œuvre d’éléments déchaînés et de musique romantique, avec des émotions à fleur de peau. Finalement, c’est un concentré de ce qu’on attend de l’opéra. Wagner est certes un peu plus intimidant que Puccini et Verdi, mais il est plus accessible qu’on ne le croit. Et le Vaisseau fantôme, en particulier, qui est un opéra fédérateur, est particulièrement indiqué pour une diffusion sur grand écran.

TM . L’opération Opéra sur écran(s) n’est pas la seule que vous menez pour ouvrir les portes de cet art au plus grand nombre. Pourriez-vous nous dire un mot des autres actions mises en œuvre ?

MR . Le bâtiment en lui-même est en soi un outil de médiation, dans le sens où entrer dedans est déjà une expérience. C’est pourquoi nous participons chaque année au week-end « Tous à l’opéra ».

Un autre moyen de s’intéresser à l’opéra est aussi de découvrir l’envers du décor : pouvoir assister à des répétitions, rencontrer les artistes, voir le spectacle en train de se construire.

Nous faisons un effort pour faciliter l’accès à l’opéra. Acheter une place doit, par exemple, être presque aussi simple que d’acheter une place de cinéma. Nous nous efforçons de ne pas créer d’entre-soi ou d’élitisme et, au contraire, de montrer aux spectateurs qu’ils sont tous les bienvenus.

Je terminerai en disant que s’accorder une soirée à l’opéra, c’est une chose que l’on fait pour soi : on ose rentrer dans un opéra et se laisser emporter par la magie qui s’y trouve. Nous devons, pour notre part, veiller à ne pas perdre cette magie.

Pour retrouver toutes les informations sur cette diffusion : le site de l’Opéra de Rennes

Voir ci-dessous la liste des lieux de diffusion :